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05/08

Place du Village

Ces lieux qui nous rappellent la Place du Village
PARTIE I : Identifier & quantifier le phénomène tiers-lieux

EXECUTIVE SUMMARY Les villes manquent de lieux facilitant les interactions sociales. Les Places de Village et “tous les moyens de réunion et de rencontre avec le voisinage ont été éliminés”, souligne le socio-anthropologue Antoine Burret. En tant qu’acteur de la ville, il nous semble primordial que ces espaces continuent à exister. Ces lieux de rencontre sont également de puissants attracteurs urbains, qui dynamisent le tissu urbain, donnent un sentiment d’appartenance au quartier et correspondent à l’expérience commerciale de demain, plus humaine et culturelle que marchande.

Mais le lien social ne se décrète pas. Dès lors, quels sont les ingrédients nécessaires à la création de ces lieux et quel rôle peuvent jouer les investisseurs immobiliers pour qu’émergent ces nouvelles Places de Village ?

Pour répondre à ces questions, notre regard s’est tourné vers les tiers-lieux. Mi-espace public, mi-lieu de commerce, où l’on vient se restaurer, s’approvisionner, travailler, se divertir ou encore débattre, un tiers-lieu est “en quelque sorte une place publique avec un toit” selon les mots de l’architecte Sophie Ricard. 

Cette étude réalisée par Curiosity is Keys, le véhicule R&D de Keys REIM dédié à l’exploration des modes de vie immobiliers du futur, dresse un état des lieux des tiers-lieux en France et interroge différents acteurs sur leurs démarches respectives. Dans la diversité des tiers-lieu existants, une constante demeure : ces “places publiques avec un toit” naissent de personnes, des porteurs de projet qui intègrent les habitants du quartier dans une programmation unique, collective et protéiforme pour chacun de ces lieux.

Et pour que ces lieux soient pérennes, la question de leur viabilité financière ne peut être éludée. Aussi, en tant qu’investisseur immobilier nous nous interrogeons sur le rôle que nous pouvons jouer aux côtés des porteurs de projets pour bâtir et pérenniser ces nouvelles “Places de Village”, lieux alternatifs d’un nouveau genre au service de ses voisins et pouvant accueillir des commerces nouvelle génération, responsables, conviviaux et ancrés dans leurs quartiers. 

Cette étude dessine donc en conclusion les contours d’une démarche opérationnelle de co-construction de Places de Village, pour aider l’investisseur immobilier à comprendre comment mettre ses compétences au service des projets locaux. Il s’agit de développer une expertise pour identifier les acteurs qui peuvent prendre la main sur la programmation et leur proposer un soutien et une boîte à outils pour le lancement de chacun de ces projets uniques. 

1. Trois pré-requis incontournables pour des Places de Village 

L’étude montre que les tiers-lieux sont de natures et de formats extrêmement divers mais que trois points communs apparaissent dans tous les projets :

01. Des personnes à l’initiative d’un projet

Un tiers-lieu ne se construit pas à partir du lieu comme un autre projet immobilier, qui part du bâti pour envisager des usages. Le tiers-lieu se construit à partir des personnes qui lui donneront son âme. Une telle démarche naît de la rencontre de plusieurs acteurs qui partagent une vision commune pour le quartier : acteurs engagés, entreprises en cheminement vers l’impact et le “for good”, acteurs locaux historiques et nouveaux arrivants, associations, petites entreprises ou grandes organisations… On peut citer l’exemple de la nouvelle Flèche d’Or à Paris, dont le projet d’occupation est né du rassemblement de 8 collectifs locaux.

02. Des activités variées et évolutives

C’est la programmation diverse et constamment renouvelée des tiers-lieux qui permet de faire vivre ces destinations. Le plus souvent, on observe une complémentarité d’activités marchandes et non-marchandes, les premières permettant d’assurer la pérennité des secondes. L’écosystème Darwin à Bordeaux, par exemple, abrite une multitude d’activités : coworking, bureaux, La Pépinière (espace consacré aux métiers de l’économie verte, du développement durable et de l’innovation d’usage), le bistrot du Magasin général, commerces (épicerie, surf shop, librairie, boutique d’apithérapie, Emmaüs), espaces de sport (skate park, roller derby ou Bike Polo dans les hangars, Le Bivouac pour la pratique de yoga, les pilates ou la méditation), l’Étincelle (recyclage de vélos), murs pour le street art, living lab sur les nouvelles formes d’agriculture urbaine et brasserie artisanale. A Lisbonne, le LX Factory héberge des commerces, des bars et restaurants, un hôtel, un espace de coworking et une résidence de startups mais accueille également des artistes en résidence et propose une programmation musicale et de nombreux évènements comme des expositions ou le premier festival du café du Portugal.

03. Un lieu avec et pour son quartier

Un projet fédérateur, à vocation d’intérêt général, inclusif et ouvert sur son quartier, grâce à des activités non-marchandes ancrées dans leur territoire (associations locales par exemple), espaces, biens ou services accessibles à tous sans contrepartie financière.

Citons par exemple la PADAF à Antony qui accueille un centre d’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile (234 places) géré par l’association Aurore ou la Maison de la Conversation dans le 18e arrondissement de Paris qui co-construit sa programmation avec les associations du quartier.

2. Un cahier des charges strict pour identifier les porteurs de projet

En tant qu’investisseur immobilier, nous devons réfléchir aux moyens de permettre à ces Places de Village d’être pérennes et viables sans subventions. De cette exigence opérationnelle découle un cahier des charges en dix points pour identifier les porteurs de projets à qui nous pouvons proposer soutien et outils.

01. Une identité forte : et une thématique qui fasse destination 

02. Une équipe locale et diversifiée : qui donne une âme au projet et l’ancre dans son territoire

03. Un enjeu collectif : pour un projet fédérateur, à vocation d’intérêt général

04. Un “commun” : espace, service ou ressource partagée et mutualisée pour le quartier, sans contrepartie financière

05. Plusieurs activités marchandes et non marchandes. L’association d’activités marchandes aux côtés des activités non-marchandes permet aux premières de financer les secondes. Plus précisément, il ressort de nos travaux qu’un bon mélange d’activité pourrait associer a minima une activité culturelle, une activité de restauration – bar ou alimentaire, une activité de commerce et une activité associative.

Il ressort de notre analyse que les activités rémunératrices, destinées générer suffisamment de chiffre d’affaires pour maintenir son bilan à l’équilibre sont souvent les mêmes :

  • Espace bar ou restauration ou carte à emporter
  • Organisation de formations, ateliers ou séminaires à destination des entreprises
  • Privatisation d’espace (réunion, conférence de presse, mini-sommet, conférence…)
  • Location de matériel (bricolage, fabrication additive, maquette…)
  • Location de postes de travail (coworking)
  • Billetteries culturelles (concert « premium », vernissage en présence de l’artiste…)

06. De l’évolutivité : qui permette au lieu de vivre tout au long de la journée, semaine et année

07. De la proximité : et un lieu ouvert sur son quartier, pour que le lieu serve vraiment ses riverains, habitants, commerçants et entreprises

08. L’accueil d’associations locales : dans l’espace et la gouvernance du lieu

09. Un modèle économique viable : même si peu rentable, pour trouver des garanties financières pour le portage de l’immobilier

10. Une gouvernance pluripartite, sous la forme d’une charte et/ou d’un comité de pilotage, pour associer aux décisions les acteurs qui participent à l’animation du lieu sur le temps long, et renforcer le caractère collectif du projet. 

3- Une attention particulière portée au modèle économique

Car dans nos métiers, sans modèle économique, pas de pérennité pour ces projets. L’équilibrage économique du projet permet au lieu d’évoluer et de se développer au gré des opportunités locales.

Nous identifions 8 indicateurs déterminants pour définir son modèle économique “Place du Village” :

Pour lire l’étude, téléchargez le rapport complet ci-contre.